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Fragments amoureux
19 mars 2007

Une étreinte plus précise

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Barthes parle peu du corps à corps... Il y a bien un chapitre "corps" et un autre "contact" dans les Fragments. Ce qu'il dit du contact est d'ailleurs assez beau : le frôlement fugace qui fait frissonner... Mais ce qui spécifie l'amoureux, c'est selon Barthes, le fait que le frisson ne vient pas du plaisir mais de l'appel du sens que constitue ce contact :
L'amoureux, Werther en l'occurrence "crée du sens, partout, de rien, et c'est le sens qui le fait frissonner: il est dans le brasier du sens. Tout contact pour l'amoureux pose la question de la réponse. Il est demandé à la peau de répondre."
L'électrique d'un frôlement de doigts qui peut mettre le corps en transe parfois plus sûrement qu'un baiser profond.
Mais voilà, ce qui obsède Barthes, c'est, non pas seulement la réponse de l'autre, mais l'attente de la réponse de l'autre. Dans le frôlement de doigts, dans le contact d'un bras ou d'une cuisse qui ne se retire pas, Barthes voit l'amoureux dans une perpétuelle expectative. On est sans cesse dans l'avant. On est sans cesse suspendu au désir de l'autre.
A l'amoureux, il oppose le pervers, celui qui prend son plaisir tout seul dans le contact.

Quant au chapitre "corps", il faut bien constater que le sens prédominant est la vue : voir, observer, scruter. Fouiller, certes, mais fouiller du regard...

Et sentir ? Ces deux sens fusionnés en un seul mot... sentir, l'odeur, le toucher... le toucher des doigts, de la pulpe des doigts, le toucher des seins, des lèvres, des cuisses... Le sentir de toutes ses odeurs, des senteurs de tous les coins de son corps... Se presser contre lui...

Ou le frôler seulement, mais dans l'électricité qui traverse la jonction de deux pôles...


Le frisson unique de Barthes, c'est l'existence suspendue à la réponse de l'Autre, susceptible de l'anéantir à tout instant, car rien n'est jamais acquis, évidemment. L'autre, c'est par définition, celui qui peut sans cesse partir, mourir, s'évanouir, se refuser, disparaître, rejeter.

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Mais le frisson de faire frissonner l'autre ?

Quand nos lèvres effleurent sa nuque, parcourent sa colonne

vertébrale...

Avant même qu'il se retourne et nous regarde.

Qu'il soit sensible à nous.

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